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12 janvier 2015

Journalism is about to be slow

par Célia Ramain

A l’heure des smartphones, la course à l’audience passe par une course à l’information (notifications push, articles/listes prêts à consommer, informations en continu…) Ces exemples, vous les connaissez, vous les subissez même parfois. Connecté en permanence, votre premier réflexe au réveil est de lire votre fil Twitter. Vous lisez beaucoup d’articles, rapidement et partout. Junk journalisme? Pourtant, un autre modèle est possible, encore malheureusement méconnu.

Ce modèle, c’est le ‘slow journalism‘. Nouveau modèle journalistique, que certains pourraient décrier comme archaïque , mais qui remet en lumière le temps d’écriture de l’auteur (et donc de vérification des informations) et le temps de lecture . Se poser, prendre son temps pour entrer en immersion dans un récit de voyage, ou une enquête poussée qui reprend les principes du grand reportage. L’expression ‘rentrer en immersion’ a été choisie consciemment: le slow journalisme va s’appuyer sur une utilisation très poussée et léchée de contenu multimédia.

Le premier à avoir démocratisé ce modèle est le NY Times en décembre 2012, avec son reportage ‘Snowfall, The Avalanche at Tunnel Greek‘. Le reportage, sur 6 pages a une présentation extrêmement épurée, et s’appuie sur un système de parallax scrolling. En somme: le lecteur se déplace dans le reportage par un défilement haut et bas. La parallaxe fait en sorte que les différents éléments du reportage vont répondre à la vitesse de lecture et aux actions de l’utilisateur. Le lecteur est face à des vidéos en plein écran qui s’enclenchent automatiquement et s’insèrent avec fluidité parfaitement dans le reportage. Notons par ailleurs que ce reportage a d’ailleurs reçu le prix Pulitzer d’article de fond en 2013.

Depuis sur ce même modèle, d’autres reportages ont vu le jour, par exemple Norway, The Slow Way.

L’ancienne directrice du New York Times, Jill Abramson, veut se faire le porte parole de ce nouveau modèle de storytelling, et plus précisément, de scrollitelling. L’an dernier, en décembre 2014, elle annonçait son envie de lancer son projet où chaque mois serait mis en ligne un article, un seul. Mais un article long et parfait. Et la perfection aurait un prix: 100 000 dollars, soit 80 000 euros. Alors certes, il faut partir du principe qu’elle demandait 120 000 caractères (soit une douzaine de pages tout de même) et que ces reportages fleuves sont l’objet de plusieurs mois d’immersion de la part du journaliste, mais un tel prix semblait ahurissant d’autant plus qu’elle souhaitait mettre en place un système d’abonnement à hauteur de 3 dollars par mois et que les auteurs dans son idée, pouvaient être également rémunérés selon le nombre de vues qu’ils auraient faites.

Donc, le modèle économique qu’elle souhaitait mettre en place a de quoi laisser circonspect.

Cela dit, d’autres modèles, cette fois européens, ont réussi à tirer leur épingle du jeu; et cela en partant de l’inconvénient que ces reportages sont longs dans leur élaboration et chers (car nécessitent finalement plus de professionnels qu’un article dit traditionnel).

En France, ils sont plusieurs acteurs à se lancer dans cette vision du journalisme; c’est le cas par exemple du 4 Heures, qui revendique haut et fort son ambition: « À côté des sites de news, des réseaux sociaux, des alertes sur mobile, Internet est le meilleur endroit pour déployer une forme de journalisme ambitieuse : le reportage. Le journalisme dans sa forme la plus pure et originelle, que Le Quatre Heures veut valoriser grâce aux possibilités du multimédia.« 

Même constat chez Ulyces: « Nous publions chaque jour des histoires vraies sélectionnées pour leur qualité littéraire et leur exigence journalistique. »

Aux Pays-Bas, De Correspondent a réussi à attirer 30.000 abonnés qui déboursent 60 euros par an. Soit une cagnotte de près de 2 millions d’euros.

Donc oui, il y a bel et bien un public prêt à investir dans des reportages long format, (quand bien même ils ne traiteraient traitent pas de l’actualité chaude) ; un public qui partageraient avec ces journalistes, une certaine vision du journalisme, moins quantitative mais plus qualitative.

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