Interview du 19 novembre 2015
Dans le monde du documentaire, on ne la présente plus. Après avoir réalisé près d’une dizaine de court-métrages, quatre longs et cinq documentaires, Claire Simon a sillonné pendant plusieurs années les allées de celle qu’elle appelle « la plus grande place publique de France », la Gare du Nord. De ce travail sont nés le film de fiction Gare du Nord , le documentaire Géographie humaine, une pièce de théâtre ainsi que le web-documentaire Garedunord.net.
Avez-vous décidé seule du sujet de ce web-documentaire ou vous l’a-t-on commandé ?
Claire Simon : Non, évidement, j’étais totalement libre sur ce projet, comme tous les autres d’ailleurs. Je suis cinéaste et tient à cette liberté.
Comment vous est venue l’idée de traiter ce sujet-là ?
CS : Pour moi, la Gare du Nord est un endroit mythique, un endroit au cœur de beaucoup d’évènements historiques. C’est pour moi, la place publique la plus grande de Paris et de France. Tous les jours, se croisent des milliers de personnes de culture, de nationalité et de milieux différents au même endroit. Je trouve cela exceptionnel. Chacun a également sa propre définition de la Gare du Nord, certains la trouve dangereuse, d’autres en font un point de rendez-vous. Pour d’autres encore, ce n’est qu’un hall où stationnent des trains, etc… Sauf que l’on ne connait presque jamais la vision et l’origine de notre voisin. C’est un peu pour cela que j’ai voulu faire un film de fiction tout d’abord, ce que j’ai fait, où l’on part à la rencontre de ces personnes. Ce n’est qu’ensuite que j’ai décidé d’en faire un web-documentaire, parallèlement au documentaire Géographie humaine.
Ce web-documentaire est donc une sorte de « bonus » au film ?
CS : Non, on peut tout à fait profiter du web-documentaire sans avoir vu le film et vice-versa. Mais il est vrai que j’ai réutilisé dans le web-documentaire, certaines scènes tournées initialement pour le film.
Pourquoi avoir choisi ce concept de temps dans Garedunord.net ?
CS : Je voulais, contrairement au film, que l’internaute soit acteur du média. C’est pour cela, que j’ai décidé de lui laisser le choix de l’endroit et du temps (matin, midi ou soir). Qu’il puisse se balader comme il l’entend dans la gare, en fait.
Même si vous avez réutilisé des images d’une autre de vos productions, ce web-documentaire a quand même dû vous coûter une certaine somme, avez-vous une idée des budgets prévisionnels et réels ?
CS : C’est assez compliqué de répondre à cette question, car je n’ai pas l’information exacte justement car les budgets du film et du web-doc étaient un peu mêlés. Mais si je devais estimer la part du budget nécessaire à la réalisation du web-documentaire, je dirais quelque chose comme 110 000 euros.
Comment avez-vous fait pour rassembler cette somme ?
CS : Nous avons été aidé par trois organismes différents : France Télévision, la région Aquitaine et le Centre National du Cinéma dans le cadre de l’aide aux nouvelles technologies. Heureusement que ce dernier existe en France car cela représente une grande proportion des aides sans lesquelles je doute que nous puissions nous en sortir.
Pourquoi la région Aquitaine ?
CS : Ce sont les web-designeuses qui se sont occupées de cette subvention car elles sont originaires de la région Aquitaine.
D’ailleurs parlons de l’interface du site internet. Est-ce ce à quoi vous vous attendiez ?
CS : Non, pas vraiment. Je suis même déçue voire énervée car le site ne fonctionne pas correctement. 9 fois sur 10, vous pouvez être sûr qu’il va ramer. Il est beaucoup trop lourd à charger. Je ne voulais pas qu’il soit aussi chargé tant au niveau de son poids que de son visuel. Je voulais quelque chose de léger, de spontané et que le hasard fasse les choses.
Avez-vous rencontré d’autres difficultés pendant ou après le tournage ?
CS : Oui, des difficultés il y en a toujours… Mais si vous voulez, une des principales difficultés a été le temps de tournage. Trop court. Nous avons tourné pendant seulement cinq jours. Alors que l’objectif premier de ce web-documentaire, c’est la rencontre. Or, pour rencontrer des personnes qui ont quelque chose à dire, il faut du temps et nous aurions aimé en avoir plus.
Mais vous n’aviez pas pu préparer le tournage en amont ?
CS : Non, il est impossible de prévoir qui est-ce que nous allons rencontrer par hasard sinon ce n’est plus spontané. Or, c’est cette spontanéité que nous recherchions.
Aviez-vous prévu une campagne de communication pour faire connaître garedunord.net ?
CS : Non, pas du tout. Normalement, c’est notre diffuseur France Télévision qui s’occupe de cet aspect du projet. Mais, je crois que peu de communication a été faite.
Avez-vous eu des retours des internautes sur votre projet ?
CS : Non pas vraiment, mis à part ces nombreux dysfonctionnements qui les font un peu fuir. Je les comprends en même temps.