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13 février 2015

Isabelle Fougère, co-réalisatrice d’Alma, une enfant de la violence

par Célia Ramain

Alma, une enfant de la violence est très rapidement devenu un webdocumentaire de référence, salué par la critique , les prix, et atteignant des records d’audience pour un webdocumentaire d’Arte; puisque mis en ligne le 25 octobre 2012, il a dépassé en à peine 3 semaines, les 260 000 visites et le 1.3 million de pages vues. Venue à l’occasion de la Rencontre Professionnelle « Cross et Transmedia #3 » organisé le 5 février par le Festival du court Metrage de Clermont, sa co-réalisatrice Isabelle Fougère a accepté de répondre à quelques questions pour PressLab.

 

-Comment est né le projet de webdocumentaire ‘Alma, une enfant de la violence’?

C’est d’abord une rencontre du photographe Miquel Dewever-Plana avec Alma, à un moment où il travaillait sur les phénomènes de violence au Guatemala, puisqu’il faisait toute une enquête photo journalistique. Quand il a rencontré Alma, il m’a très vite proposée de travailler sur elle et de faire un livre, de faire un récit très littéraire de son histoire, accompagné de son travail photographique. Puis très vite on en est arrivés à l’envie de faire un travail documentaire, et très vite l’envie de faire un webdocumentaire pour toucher plutôt un public de jeunes. C’était notre objectif et donc on a travaillé à partir du récit d’Alma, un récit fleuve que j’ai enregistré de longues heures, où elle m’a vraiment racontée sa vie dans tous ses détails. C’est à partir de cette matière que j’ai écrit un scénario qui nous a ensuite permis de construire l’interview et de filmer son témoignage avec des ressorts dramaturgiques qui appartiennent plus à la fiction, que curieusement on n’utilise pas beaucoup en documentaire et encore moins en journalisme. Pourtant, ils permettent de raconter une histoire de manière rythmée et vivante, puisque l’histoire d’Alma a une composante universelle certaine, c’est le drame de la survie, notamment de la femme dans un milieu hostile… Du coup la réalisation s’est adaptée à cette histoire là.

-Je reviens sur le projet initial, le projet de livre, qui vient faire du propos documentaire un projet transmédia, qui est encore rare dans le milieu documentaire…

Tout à fait, c’était vraiment l’idée de départ. Le projet est aussi devenu un projet théâtral, donc oui les ramifications se sont vraiment multipliées. C’était vraiment très intéressant d’avoir cette possibilité de récits différenciés qui se complètent. L’histoire du webdocumentaire c’est le témoignage pur d’Alma et la force de son récit, quand le récit littéraire fait intervenir des morts, La mort d’ailleurs, des personnages fictifs, des personnages réels mais finalement tous les partis prenants de l’histoire d’Alma parlent. Le livre est une série de monologues, où on entend parler ses victimes, ses compagnons, sa mère etc. Au final, cela permet un récit choral assez différencié, c’est toujours la même histoire qui se raconte mais sous d’autres points de vue et l’émotion est différente quand on le lit.

-Avez vous rencontré des difficultés, même inattendues?

Non ça a été des difficultés auxquelles on s’attendait. Alma n’était pas une difficulté, puisqu’on a fait un gros travail de discussion pour être vraiment certains qu’elle avait envie de témoigner, qu’elle n’allait pas se trahir, gérer la responsabilité qu’on avait vis-à-vis de son récit.. Après les difficultés sont inhérentes à ce genre de projet: les doutes, les difficultés de tournage, mais dans l’ensemble nous n’avons pas rencontré de difficultés spécifiques.

-Le sujet étant extrêmement dur, est ce que vous vous êtes posés la question de savoir comment garder l’attention du public pendant toute la durée du webdocumentaire?

C’était un risque que l’on était prêts à courir puisque c’est finalement une expérience qu’on avait envie de partager. Donc l’idée n’était pas de forcer, mais de faire tout ce qu’on pouvait pour donner envie de continuer et de capter l’attention et la sensibilité. Après il y a toujours cette peur quand on est auteur: est ce que ça va plaire ou non? Mais je pense qu’on ne le fait pas dans cet objectif, on a vraiment besoin de partager une histoire et finalement on va aller chercher ce qu’on a entre les mains, une capacité de récit, une capacité à générer de l’émotion, de la réflexion. On met ça en place du mieux qu’on peut et après c’est aux gens de le prendre ou pas.

Un grand merci à Isabelle Fougère d’avoir répondu à nos questions.

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