3 décembre 2020

La lutte contre l’infox : le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire impuissants

par Matthieu Da Dalou

Le phénomène de l’infox en Afrique de l’ouest prend de  plus en plus d’ampleur ces dernières années. Face à cette situation, les journalistes du Burkina Faso et de la Côte d’Ivoire mènent des actions pour contrer ce phénomène qui touche négativement le métier de journalisme. Depuis des condamnations aux campagnes d’éducation, les organisations des journalistes de ces pays sont fortement engagés mais rencontrent des obstacles.

Image d’illustration

 

Le gouvernement burkinabé, à travers son service d’information a démenti le lundi  12 novembre 2019 l’instauration d’un couvre-feu à Ouagadougou. Ce  démenti formel fait suite  à des rumeurs véhiculées sur les réseaux sociaux au sujet d’une probable attaque dans un hôtel de la place.

Interrogé par les journalistes de la radio diffusion télévision du Burkinna,  le ministre de la Communication et des relations avec le Parlement, Rémis Dandjinou a déclaré que « Cet acte de désinformation sur les réseaux sociaux fait partie des œuvres obscurantistes d’hommes et de femmes qui ont des intérêts inavouables à déstabiliser notre Faso ». Rémis Dandjinou a alors appelé la population à la vigilance face à ce qu’il a appelé une  campagne d’intoxication et de manipulation de l’opinion, à travers la diffusion d’informations erronées sur les réseaux sociaux.

« De telles rumeurs circulent quotidiennement sur les réseaux sociaux », soutient le président de l’association des journalistes du Burkina(AJB) Gézouma Sanogo. Des médias sont mêmes tombés dans le piège des fake news. Certains médias ont repris des informations des réseaux sociaux sans vérification. Des exemples concrets, M Sanogo en donne « Le premier est l’attaque de l’Etat-major général des armées en mars 2018. Pendant que la riposte était toujours en cours, l’AFP a donné un bilan de 28 morts, ce que certains médias ont repris sans vérifier. Le deuxième est l’affaire de poupée sexuelle vendue au grand marché de Ouagadougou. Le troisième est une affaire de riz en plastique à Ouagadougou. Le quatrième est celui de 18 sabots Denver que la police municipale de Ouagadougou a acquis à 150 millions ». L’origine des fake news vient généralement  du que fait des hommes politiques  ont l’intention de nuire à d’autres en éclaboussant leur image ou bien encore des journalistes qui ne prennent pas assez le temps pour recouper les informations.

Gezouma Sanogo, président AJB. Crédit photo : Centre de presse Norbert Zongo

Face à cette situation, l’AJB se contente de faire connaitre la législation en vigueur et d’éducation aux médias sociaux à travers des formations et des conférences. Les journalistes et les acteurs de la société civile sont en effet concernés par ces activités.

Gezouma Sanogo  relève par ailleurs que  le manque de ressources financières et matérielles limite les actions de l’organisation qu’il dirige. Cependant, il soutient que la lutte contre les fake news demeure  l’un des projets phares des prochaines années. Le phénomène n’est pas nouveau mais Gezouma Sanogo assure cependant que multiplication des canaux de communication et la facilité d’accès à  Internet est à l’origine de cette situation.

« C’est un perpétuel combat auxquels les médias doivent s’unir pour être à la hauteur de la tâche »  ajoute-t-il.

La bonne nouvelle à court terme soutient le président de l’AJB, l’Institut la Dw Akadémie africa et le centre de presse Norbert Zongo du Burkina ont lancé le 13 décembre 2019 une plateforme contre l’infox. Dénommé Fasocheck, cette  plateforme a pour but de lutter contre les fake news. Salouka Boureima représentant de l’institut au Burkina Faso , déclarait à la cérémonie de lancement le 13 décembre que l’ampleur du phénomène invite à une prise de conscience des organisations de médias et à s’organiser pour contrer ce phénomène qui impacte négativement le métier de journaliste.

La côte d’ivoire aussi frappée par le phénomène

La Côte d’Ivoire à l’instar des autres pays du monde, n’échappe pas au phénomène des fake news. Il est beaucoup présent sur le réseau social Facebook déclare Jean Coulibaly, président de l’Union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire. Selon lui, les professionnels de l’information, les activistes mais aussi des autorités tombent dans le piège des fake news.

Des exemples, ils en existent. Deux ont marqué particulièrement le pays. Il s’agit de la condamnation du député Alain Lobognon, le 29 Janvier 2019. Il a été condamné  à un an ferme de prison et 300 000 francs CFA (457 euros) d’amende pour avoir diffusé de fausses nouvelles. En février 2017, six journalistes et un directeur de publication étaient poursuivis pour diffusions de fausses nouvelles. Ces condamnations ne sont pas des cas isolées. Plusieurs personnes ont été poursuivies  et condamnées après la diffusion d’informations erronées. «  La plupart du temps, c’est lorsque, ces fausses informations portent atteinte à la cohésion sociale ou des plaintes sont déposées que le procureur lance des poursuites »  renchérit le président de l’Union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire(UNJCI).

Conscient que ce fait touche négativement la profession des journalistes, la faitière des journalistes ivoiriens  a organisé des ateliers de formation sur le fack checking.

Le président de l’UNJCI révèle que son organisation a soutenue l’organisation des conférences  sur la nouvelle loi adoptée en 2018 au sujet de la diffusion des fausses nouvelles. Jean Coulibaly affirme qu’il s’agissait d’expliquer les contours de la nouvelle loi réprimant la publication  et le partage de fausses nouvelles en côte d’ivoire. Après cette étape, une série de formations se tiendra à partir de janvier 2020 au profit des journalistes et des activistes. « Nous voulons à travers cette série de formations, sensibiliser nos confrères sur la nécessité de bien utiliser les réseaux sociaux et surtout comment ne pas tomber dans le piège des fake news  ». Ces formations visent également à préparer les journalistes sur la couverture des élections présidentielles.

Au Burkina Faso, des fausses nouvelles diffusées sur les opérations militaires peuvent conduire à dix ans d’emprisonnement selon le code pénal révisé en Juin 2019. En côte d’ivoire, les personnes poursuivies pour diffusion de fake news sont condamnés à payer des amendes ou écopent des peines allant d’un à dix ans d’emprisonnement.

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