Grâce aux nouvelles technologies de la communication, l’actualité mondiale se diffuse en très peu de temps. Tout comme les fausses informations. Souvent liées à des intérêts politiques, elles servent à manipuler l’opinion. Les techniques de persuasion s’avèrent multiples. En voici un tour d’horizon.
Le sociologue français Pierre Bourdieu a théorisé le lien étroit entre les outils de communication et les rapports de pouvoir. Les mots modèlent notre façon de penser et d’appréhender la réalité, c’est pour cette raison que les médias sont très influents dans nos sociétés contemporaines. En cause, la démocratisation des nouvelles technologies et d’Internet. Les figures publiques ayant accès aux outils de communication de masse sont dépositaires d’un grand pouvoir, ce qui implique de grandes responsabilités. Ces faiseurs d’opinion peuvent être des journalistes, des politiciens, des artistes… Leur simple présence dans l’espace médiatique revêt de facto une légitimité pour le public. Pourtant, nombre d’entre eux réalisent des déclarations qui manquent de rigueur, malgré l’impact que cela peut avoir. Leurs déclarations peuvent certes être remises en question par des journalistes ou experts par la suite, mais, dans nos sociétés boulimiques d’informations, ces rectifications vont juste se fondre dans la masse. Le message est déjà passé et a été reçu.
On pourrait penser que ces abus d’influences sont anodines. Cependant, elles peuvent avoir un impact considérable. Prenons le cas de la campagne sur le processus de retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne, aussi appelé Brexit. Lors des débats qui ont eu lieu en vu du référendum du 23 juin 2016, deux camps se sont distingués dans l’espace médiatique: ceux en faveur et ceux contre la sortie de la Grande-Bretagne de l’UE. De nombreux politiciens participaient à ces débats et avaient des avis très tranchés dans le cadre de cette réflexion nationale. Or, après la sortie des résultats du vote et la victoire du “oui”, nombre d’entre eux sont revenus sur leurs déclarations précédentes en temporisant leur propos.
Par exemple, Nigel Farage, leader de UKIP, parti souverainiste pro-Brexit, a déclaré à plusieurs reprises durant toute la campagne que le Royaume-Uni verserait 350 millions de livres Sterling chaque semaine à l’Union européenne. Il avait promis qu’en cas de victoire du Brexit, il les ferait reverser à la Sécurité sociale anglaise. Après la victoire du Brexit, il a fini par admettre que cette promesse était une erreur, car elle serait intenable.
Un argument qui a également conquis les citoyens pro-Brexit était celui de l’immigration. Plusieurs politiques avaient déclarés avoir l’intention de réguler l’immigration venu des autres pays membres de l’UE. Pourtant, l’eurodéputé conservateur Daniel Hannan, qui faisait partie de ceux tenant ce discours, a avoué sur la BBC qu’il y aurait finalement une “libre circulation du travail”, comme c’est déjà le cas actuellement.
Les médias ne sont pas en reste au niveau de ces déclarations à deux vitesses. Exemple : le tabloïd le plus lu Outre-Manche The Sun a déclaré à trois mois du référendum que la reine Elizabeth II, très influente auprès du peuple britannique, serait europhobe. Les propos ont rapidement été démenti par Buckingham Palace.
Ces déclarations ont eu une influence sur les votes et la victoire du “oui”. Volontaire ou non, ces propos erronés ont probablement eu un impact sur le public. Ces omissions, délibérées ou non, tiennent-elles du débat démocratique ou de la manipulation de l’opinion?